Kazakhstan

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Introduction

Le Kazakhstan est le neuvième pays le plus grand du monde de par sa taille, mais aussi un des plus faibles de par sa densité de population, avec un peu plus de 15 millions d’habitants seulement sur ce vaste territoire. Riche en ressources naturelles, surtout du pétrole, du gaz et des minerais métalliques, y compris d’importants dépôts d’uranium, le Kazakhstan a une économie qui dépend largement de l’extraction de ces ressources. La hausse des prix du pétrole, du gaz et des métaux sur les marchés mondiaux ces dernières années a permis au pays de connaître une croissance de près de 10 % du produit intérieur brut (PIB) en 2002-2006. Mais il a été touché par la crise financière mondiale en 2007, en raison de la dépendance du secteur bancaire à l’égard du crédit étranger.

Ce sont les secteurs financiers et de la construction en pleine expansion qui ont été le plus touchés. Le PIB n’a augmenté que de 8,5 % cette année et la croissance économique devrait ralentir encore en 2008. L’augmentation de la masse monétaire et l’augmentation des prix alimentaires ont fait grimper le taux d’inflation, qui se situait à 18,8 % à la fin de 2007 [1]. Les experts s’attendent à une amélioration à la fin de 2008 seulement car le gouvernement poursuit ses réformes pour gérer le taux d’inflation et aider les secteurs touchés par la crise économique.

La croissance économique rapide des dernières années, les niveaux élevés d’alphabétisation, la vision à long terme du président et les nouveaux programmes gouvernementaux font partie des principaux facteurs qui expliquent l’augmentation du nombre des ordinateurs et de l’utilisation de l’internet au Kazakhstan, permettant ainsi à la société de l’information du pays de se développer. La hausse du revenu disponible permet à la population d’acheter des ordinateurs. La baisse des tarifs de l’internet, même s’il reste encore cher par rapport aux États membres de l’Union européenne (Political Intelligence/Internews, 2006), et une plus grande disponibilité de l’internet large bande dans les grandes villes facilite l’accès à l’information mondiale et encourage le partage de l’information et l’interaction entre les gens. La mise en œuvre de deux programmes étatiques – le Programme de réduction de l’inégalité face à l’information et le Programme de mise en œuvre du gouvernement électronique en République de Kazakhstan – devrait permettre très bientôt un accès universel aux principaux services gouvernementaux, plus particulièrement pour les groupes mal desservis et vulnérables (Beklemishev et Tsekhovoi, 2006).

Accès physique à la technologie

Pour que la société de l’information se développe suffisamment, il faut assurer la liberté d’accès à l’information. À l’ère numérique, les principaux moyens d’accès à l’information sont numériques : le téléphone, le mobile, les ordinateurs, les kiosques d’information, etc. Il est donc important de voir de quelle technologie dispose le pays comme préalable au développement de la société de l’information – tant le matériel que les services qui l’accompagnent, comme l’accès internet. Il faut également garder à l’esprit que la technologie en soi n’est pas suffisante pour créer une société de l’information dynamique.

Les technologies de communication fixes et sans fil comprennent diverses options de connectivité mais qui sont toutes dépendantes, d’une façon ou d’une autre, de la dorsale de communication du pays – un système de réseaux de divers opérateurs qui connectent les villes entre elles et les connectent aux réseaux d’autres pays. Au Kazakhstan, cette dorsale est constituée des réseaux de sept grands opérateurs et comprend essentiellement des lignes de fibre optique, bien que l’on utilise aussi largement le satellite et les connexions hertziennes sans fil.

Kazakhtelecom, le plus grand opérateur de télécom du Kazakhstan et monopole de fait, possède de loin le plus grand réseau, qui comprend des lignes de fibre optique connectant toutes les grandes villes du pays et assure la connexion avec les pays voisins. La longueur totale de ce réseau de fibre optique est de près de 12 000 kilomètres, avec des capacités de transmission de données maximum de 10 gigabits par seconde (Gbps) entre trois des plus grandes villes et d’un Gbps avec les autres villes (Kazakhtelecom, 2007). Certains des autres grands opérateurs ont construit leurs propres réseaux de fibre optique et continuent d’investir alors que d’autres dépendent de l’infrastructure de Kazakhtelecom.

Les communications par satellite sont largement utilisées et constituent un moyen rentable de couvrir de grandes distances. Certains opérateurs de télécoms, comme Nursat (qui appartient à Kazakhtelecom) utilisent presqu’exclusivement la connectivité par satellite numérique comme dorsale de ses réseaux. Des milliers de microstations terriennes (VSAT), très populaires, offrent des services internet et téléphoniques. Le Kazakhstan a lancé son propre satellite en 2007, KazSat-1, et prévoit d’en lancer au moins trois autres dans les prochaines années, ce qui devrait normalement éliminer la nécessité d’utiliser d’autres satellites et apporter une grande variété de services à la population, comme la télévision numérique, l’internet et la téléphonie. Les experts se sont opposés à ce type d’investissement, malgré la position ferme du gouvernement.

La télécommunication par ligne fixe est le moyen le plus élémentaire d’accès à l’information, mais outre les services de téléphonie normaux, on peut offrir d’autres services comme la communication vocale sur protocole internet (VoIP), l’accès réseau à distance et l’accès internet large bande en faisant appel à un réseau numérique à intégration des services (RNIS) et aux lignes d’abonnés numériques (LAN).

Début 2008, le Kazakhstan comptait 20 lignes de téléphone fixes pour 100 habitants et devrait atteindre un taux de 23 % d’ici la fin de l’année, selon l’Agence pour l’informatisation et la communication du Kazakhstan (AIC) [2]. En même temps, le mobile représente 78 utilisateurs pour 100 habitants ce qui en fait la communication privilégiée. Cela ne signifie pas nécessairement que près de 80 % de la population utilisent des services mobiles car les opérateurs ne signalent que le nombre des cartes d’identification d’abonnés (SIM) actives, et on sait que certains possèdent plus de cinq cartes à leur nom. Mais on peut dire sans trop se tromper que plus de la moitié de la population utilise des mobiles et, selon les opérateurs de mobile, près de la totalité de la population est couverte par les réseaux de communication mobile.

L’AIC a récemment annoncé que le taux de pénétration de l’internet avait atteint 11 % début 2008[3]. et devrait atteindre 15 % à la fin de l’année. Ces chiffres semblent un peu exagérés, mais les experts estiment qu’un niveau de 8 % est probablement raisonnable. La principale raison de la faible pénétration de l’internet au Kazakhstan, et son faible taux de croissance, est la lenteur de la libéralisation du secteur des télécoms. Kazakhtelecom, un monopole d’État de fait, contrôle la majorité de l’infrastructure des télécommunications, possède la plupart des principaux acteurs du marché et bénéficie de relations privilégiées avec le gouvernement et l’assemblée. Les tarifs d’accès à l’internet offerts par Kazakhtelecom sont plutôt élevés par rapport à ceux des États membres de l’UE, en particulier pour les entreprises, et sont jugés généralement chers pour la population en général. Les récentes diminutions demandées par le gouvernement pour l’accès large bande ADSL ont quelque peu amélioré la situation, mais il faudrait adopter des mesures plus draconiennes [4].

Le niveau de culture informatique au Kazakhstan a été estimé à un moins de 10 % en 2007, alors que le taux de pénétration des ordinateurs n’était pas supérieur à 5 % cette année-là, selon l’AIC. Ces deux chiffres sont essentiels pour comprendre la réalité de l’internet dans le pays : une personne sans culture informatique ni ordinateur aura beaucoup plus de difficultés à utiliser l’internet. Le Programme de réduction des inégalités face à l’information a été adopté en 2007 et vise à améliorer la culture informatique et le nombre des ordinateurs. Deux projets subventionnés par le gouvernement ont été lancés fin 2007 et promettent de fournir à la population des ordinateurs à un coût abordable. Le premier est mis en œuvre par le secteur privé et l’autre appelé « Ashyk Alem » (« monde ouvert » en kazakh) est mis en œuvre par l’AIC elle-même. Ce dernier programme offre un forfait qui comprend un ordinateur personnel assemblé localement, le logiciel Vista Starter Edition de Microsoft et 10 heures d’accès internet commuté pour environ 350 dollars. La baisse des tarifs douaniers sur les ordinateurs ainsi que des mesures incitatives seraient sans doute un moyen plus efficace d’augmenter le nombre d’ordinateurs que des subventions directes, mais on doit louer les efforts d’Ashyk Alem qui visent à réduire la fracture numérique.

L’accès à l’internet grâce aux technologies sans fil comme le Wifi et le Wimax commence à s’améliorer au Kazakhstan – mais surtout dans les trois grandes villes, notamment la capitale, Astana et Almaty, la plus grande ville du pays. Un petit nombre de points d’accès sans fil Wifi ont été installés dans ces villes, surtout dans les hôtels, les restaurants et les cafés. D’autres seront bientôt installés. Kazakhtelecom a introduit le service Megaline Wi-Fi à Astana et Almaty. Ce service offre un accès prépayé aux points d’accès Wifi installés par Kazakhtelecom dans de nombreux endroits et commence à devenir populaire parmi les gens d’affaires qui se déplacent. Les opérateurs de télécoms indépendants commencent à offrir l’accès Wimax dans les zones urbaines.

Les cafés internet sont également présents dans la plupart des villes et certaines localités rurales. Les prix sont généralement abordables et attirent les étudiants et les jeunes adultes. On commence à voir des centres d’accès publics dans les bibliothèques et les centres de services gouvernementaux. Les kiosques d’information du gouvernement, qui sont installés dans chaque grand bureau de KazPost (le principal fournisseur national de services postaux), les akimats (l’équivalent de la mairie) ainsi que d’autres endroits publics, promettent d’améliorer sensiblement l’accès à l’information surtout dans les régions rurales. Le manque d’accès au world wide web sera un des facteurs qui freineront l’utilisation généralisée de ces kiosques.

La dernière option d’accès à l’internet, et sans doute la plus sous-évaluée, est la téléphonie mobile. Trois grands opérateurs de télécoms mobiles couvrent près de 100 % de la population au Kazakhstan : deux offrent des services utilisant la norme Système mondial de communication pour les mobiles (GSM) et l’autre utilise l’accès multiple par répartition de codes (AMRC). Un quatrième opérateur prend rapidement de l’expansion et offre également des services GSM. Les opérateurs GSM offrent la connectivité internet à l’aide du service général de paquet radio (GPRS) dans la plupart du pays et EDGE (taux de données améliorées pour l'évolution globale) dans les grandes villes. On parle de déployer très bientôt des services de la troisième génération, mais on ne les fait pas suffisamment connaître et les utilisateurs n’en connaissent généralement pas les avantages.

Volonté politique et soutien public

Les gouvernements peuvent être des moteurs et des facilitateurs essentiels du développement de la société de l’information. De nombreux dirigeants ont fait du développement de la société de l’information, par une utilisation accrue des technologies de l’information et de la communication (TIC), une priorité. Mais il est souvent difficile de traduire une vision d’envergure dans des programmes particuliers et même encore plus difficile de les mettre en œuvre sans perdre de vue la cible initiale. Les gouvernements finissent souvent par faire des réformes pour faire des réformes sans faire suffisamment participer le secteur privé et la société civile.

Le Kazakhstan a reconnu la nécessité de développer les technologies de l’information modernes très tôt et il continue dans cette voie par la création et la mise en œuvre des divers programmes et stratégies. Lancé par le président en 2001, le premier programme public concernant le développement de la société de l’information était appelé le Programme de formation et de développement de l’infrastructure de l’information nationale pour 2001-2003. Ce programme a conduit à une stratégie de gouvernement en ligne en 2004, deux programmes de gouvernement en ligne pour 2005-2007 et 2008-2010, deux programmes de développement du secteur des télécoms pour 2003-2005 et 2006-2008 et le Programme de réduction des inégalités face à l’information pour 2007-2009.

Les deux programmes publics sur le secteur des télécommunications ont contribué à créer l’infrastructure moderne du pays. La déréglementation, la libéralisation du secteur des télécoms, l’instauration de la concurrence et la construction d’une infrastructure ont été parmi les principales priorités des deux programmes et même si certaines cibles n’ont pas été atteintes (ou l’ont été seulement de façon marginale), ces programmes ont largement facilité la création de l’infrastructure des TIC dans le pays.

La stratégie de développement du gouvernement en ligne du Kazakhstan comprend les deux programmes mentionnés plus haut ainsi que quatre étapes : « informationnelle » (2005-2006), « interactive » (2006-2008), « transactionnelle » (2008-2009) et « la société de l’information » (2009) (Beklemishev et Tsekhovoi, 2006). Certains organismes gouvernementaux offrent déjà des services interactifs avec un certain succès. Par exemple, il est déjà possible de soumettre les déclarations de revenu par voie électronique et de vérifier si le paiement des impôts a été fait ou s’il reste encore des impôts à payer. Tout cela est fait en temps réel en utilisant des signatures numériques, ce qui différencie le Kazakhstan de bien d’autres pays. On estime que plus de 80 % des entreprises soumettent leur rapport d’impôt par voie électronique. La mise en œuvre du système d’impôt électronique a certainement motivé de nombreuses entreprises à exploiter les TIC et à en faire un élément moteur pour la formation informatique de nombreux comptables et gens d’affaire. Mais ce système fiscal électronique est loin d’atteindre les objectifs d’efficacité, de faciliter l’utilisation et de transparence.

Il existe de nombreux autres services de gouvernement en ligne au Kazakhstan, dont la plupart de nature informationnelle. La grande majorité de ces services reste malheureusement de peu d’intérêt pour les citoyens et les entreprises. Il y a deux raisons à cela. La première concerne le côté offre, le gouvernement lui-même, qui offre des services qui sont soit incomplets soit sans grande valeur pour les consommateurs de ces services. Il semble y avoir une rupture entre les besoins réels de la population et des entreprises et la perception qu’a le gouvernement de ce qui est le plus important pour eux. La deuxième raison concerne le côté demande : le nombre des Kazakhs qui comprennent ce qu’est le gouvernement en ligne et qui, surtout, se rendent compte de ses avantages est très limité. La faiblesse de la culture informatique et de l’utilisation de l’internet ne fait qu’accroître le problème.

Pour promouvoir les services de gouvernement en ligne et pour améliorer l’accès à l’infrastructure des communications et aux ressources d’information, le Programme de réduction des inégalités face à l’information a trois principaux objectifs : un taux de 20 % de la culture informatique, un taux de pénétration de l’internet de 20 % et une augmentation du rôle que jouent les TIC dans la vie du Kazakh moyen. Ces objectifs sont réalisés par la création de centres de formation, de points d’accès internet publics, de kiosques d’information et la réduction des tarifs d’accès internet et du coût des ordinateurs. Dans le cadre du programme, le gouvernement prévoit de mettre en œuvre l’essai des technologies de l’information obligatoires dans les écoles, les collèges et les universités, ce qui représente un million d’étudiants – 6,6 % de la population. Le gouvernement affirme avoir formé plus de 800 000 personnes avant la mi-2008 dans le cadre de ce programme[5]. Il prévoit de sensibiliser et de former plus de deux millions de personnes en trois ans, faisant ainsi passer le taux de culture informatique de 5 à 20 %.

Mesures à prendre

Il existe plusieurs options pour accéder à l’information au Kazakhstan mais bon nombre d’entre elles doivent être encore développées. Du fait que près de 90 % de la population n’utilisent pas l’internet et ne savent pas se servir d’un ordinateur, la situation est loin d’être satisfaisante du point de vue du développement de la société de l’information. L’infrastructure doit être continuellement améliorée. Le secteur des TIC doit être développé dans un contexte commercial libéral et le gouvernement doit assurer la concurrence, la déréglementation et l’utilisation équitable des ressources disponibles (comme le spectre de fréquences radio).

Mais il est surtout très important que les consommateurs aient la liberté de choisir les canaux d’information en fonction de leur capacité, de leurs besoins et de leurs préférences.

La possibilité de rejoindre la majorité de la population par la téléphonie mobile sans beaucoup d’investissements n’est pas reconnue dans le pays. Le Kazakhstan pourrait tirer profit de son infrastructure mobile et passer directement à l’internet mobile sans investir autant que dans l’infrastructure des lignes fixes.

Le leadership du président Nursultan Nazarbayev a été essentiel pour placer les TIC à l’ordre du jour du gouvernement. Les nouveaux programmes dont il est question plus haut montrent que le gouvernement cherche à apporter les changements nécessaires pour mettre en œuvre les services de gouvernement en ligne et améliorer l’infrastructure des TIC.

Mais il est clair également que les priorités du gouvernement ne correspondent pas à ceux des entreprises ni de la population. Il semble souvent que la mise en œuvre des initiatives de gouvernement en ligne ne soit pas véritablement conçue pour répondre aux problèmes particuliers de la population sinon pour le fait d’avoir un gouvernement en ligne.

Le gouvernement doit encore analyser la demande réelle de ses services par la population. Il lui faut harmoniser les priorités et faire en sorte que les parties prenantes participent à la conception et à la mise en œuvre des initiatives des TIC de l’État, y compris l’adoption des services de gouvernement en ligne. Les parties prenantes devraient être mieux informées des plans du gouvernement et comprendre à la fois l’influence positive des TIC sur la société et les choix technologiques qu’elles peuvent faire. C’est alors seulement qu’elles seront prêtes à participer et contribuer autant que possible au succès de ces initiatives.

Références

Agence de l’informatisation et de la communication de la République du Kazakhstan: www.aic.gov.kz

Beklemishev, A. et Tsekhovoi, A., Status of Information Communication Technologies in Kazakhstan, Volume 2, 2004-2006, Almaty, PNUD Kazakhstan, 2006.

Economist Intelligence Unit: www.eiu.com

Kazakhtelecom,  Annual Report 2007, 2007. Voir à : www.telecom.kz

Kazinform Agency : www.inform.kz

Political Intelligence and Internews, Final Report: Monitoring of Russia and Ukraine (priority 1) and Armenia, Azerbaijan, Belarus, Georgia, Kazakhstan and Moldova (priority 2): Telecommunications and the Information Society, Bruxelles, Commission européenne, 2006.


Notes de bas de page

 

[1] Economist Intelligence Unit: www.eiu.com

[3] Kazinform Agency:  www.inform.kz

[4] La meilleure offre de Kazakhtelecom est une connectivité ADSL de 256 kilobits par seconde (kbps) pour 40 dollars par mois qui inclut 10 Gb de trafic (juin 2008).

[5] Kazinform Agency:  www.inform.kz